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La Pensine de Valentine
27 mai 2008

Salle des pas perdus

Voilà 15 minutes que j'attends, je suis arrivé 30 minutes en avance pour l'attendre, elle me manque tellement, mais je ne suis pas d'un naturel patient. J'alterne entre taper du pied assis sur ces bancs ridicules et les allées-retours face au panneau d'affichage qui m'annonce toujours que son train arrivera à l'heure et pas, comme je l'espère, avec 10 minutes d'avance, mais cette marche sert surtout à me réchauffer tellement il fait froid ici.

Dans ma main, je tiens un énorme bouquet de marguerite, ces fleurs préférées, ce dernier fait sourire les passants devinant les motifs de ma présence, certaines me font même des clins d'oeil, faisant rougir de honte ou de jalousie leur compagnon. De peur d'abimer le bouquet, je me pose et regarde les mouvements de foule. A chaque fois je crois que son train arrive, je me lève, et puis je regarde le panneau d'affichage et je me rassois peneau. Mais j'en ai rapidement assez, il faut que je bouge, je fais quelques allées-retours le long de ce couloir, ce lieu de passage inhumain car anonyme, j'ai un peu l'impression d'être dans l'antichambre de la vie.
Une petite veille attire mon regard, avec son manteau de fourure, son chapeau à petites fleurs, ses mi-bas qui lui enserrent les mollets et sans oublier sa canne entre les mains : c'est un vrai stéréotype, à tel point que je la fixe trop longtemps, elle s'en aperçoit, mais loin de s'offusquer elle me signifie de la rejoindre, ce que je fais avec plaisir, j'aime découvrir les personnages.

Après m'avoir regardé, elle me demande dans quel train est ma fiancée, moi aussi je suis un véritable stéréotype dans cette gare, je souris, et lui retourne la question. Elle me raconte qu'elle attend son époux, un cheminot effectuant toujours, toujours le même trajet, 60 ans de mariage, c'est beau. La conversation s'éternise, soudain elle m'avertie que MON train arrive. Je me précipite pour retrouver ma belle. Soyons cliché jusqu'au bout : oui, nous nous jettons dans les bras l'un de l'autre, comme dans les films. Bras-dessus, bras-dessous, on prend la direction d'un café, j'ai bien besoin de me réchauffer.

Au fil de la conversation, je parle de cette vieille dame, à quel point c'était mignon son histoire, même si je suis intriguée, son mari est certainement très vieux, mais toujours pas à la retraite ? Le serveur surprenant nos paroles me racontent alors la vrai fin de l'histoire : son époux est mort il y a plus de 20 ans, depuis tous les jours, elle est là, attendant son retour, mais personne ne la voit, ici toutes les âmes sont seules, de passage. On disparaît peu-à-peu au milieu des anonymes.

Ce petit texte m'a été inspiré en passant dans la gare, le jour où j'ai découvert le nom de ce hall : Salle des Pas Perdus.

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Commentaires
V
Merci c'est très gentil à toi. <br /> Je suis toujours intimidée quand je publie un texte ici.
L
j'ai beaucoup aimé
La Pensine de Valentine
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